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Le blog de Xiu
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2 janvier 2009

Tous en selle Ils gagnent leur pain à la force de

Tous en selle

Ils gagnent leur pain à la force de leurs mollets. Ils pédalent des journées entières, tirant parfois derière eux des montagnes de chargements. Leur présence étonne les visiteurs, peu habitués à voir une telle vitalité en plein air, au milieu d'un trafic où les voitures règnent en maîtres. Souvent à tricycle, les triporteurs effectuent des métiers variés. Ils forment en Chine une population grouillante et colorée. Rencontre avec cinq d'entre eux, qui, dans leur course, ont bien voulu s'arrêter pour nous livrer une partie de leur vie.

cyclo_pousse

M. Lü, 28 ans, conducteur de cyclo-pousse

Avec sa veste traditionnelle, son pantalon et ses vieilles espadrilles, M. Lü semble venir d’une autre époque. Cette touche nostalgique s’intègre parfaitement avec le paysage du parc Shichahai, le lac et les canots à l’arrière-plan. Son sort n’a plus rien à voir avec le fameux tireur de pousse-pousse décrit par Lao She dans les années 1930, qui court de désillusion en désillusion. Aujourd’hui, il mène une existence paisible dans un cadre idyllique. Son métier est devenu une attraction touristique. Son cyclo-pousse clinquant, aux allures de calèche, détone dans la modernité urbaine. Pour 90 yuans la balade d’une heure, il emmène les touristes sillonner le vieux Beijing. Les tours de la Cloche et du Tambour, le parc Beihai, les rues commerçantes et les hutong (ruelles) n’ont plus de secrets pour lui. Son coup de pédale est mesuré, il parcourt les 8 km du circuit sans se presser. Sous le regard ravi des visiteurs, il lance parfois à la cantonade des bribes d’anglais, qui amusent les passagers : « I love you, you love me ! » Ses connaissances rudimentaires en anglais et en coréen lui ont tout de même permis de décrocher cet emploi, auprès de la société de cyclo-pousse, une entreprise d’État qui emploie plus de 300 salariés dans tout Beijing. La concurrence est rude. Ils étaient beaucoup plus nombreux avant. Avec les Jeux olympiques, les autorités ont fait le ménage dans la profession. Les indépendants ont disparu et cinq grandes sociétés se partagent désormais le marché. M. Lü est satisfait de son salaire mensuel de 1 000 yuans, sans compter les pourboires. « Ce n’est pas très fatigant. En temps ordinaire, j’ai trois à quatre touristes par jour. Physiquement, cela me permet de faire du sport tous les jours, comme si j’allais à la salle de gymnastique. » Sa seule crainte est de voir disparaître sa profession. Tireur de cyclo-pousse depuis huit ans, M. Lü n’est pas prêt de descendre de sa selle.

Yan Fenghai, 42 ans, récupérateur

r_cup_rateurYan Fenghai pédale depuis 18 ans. Son tricycle rouillé, acheté 300 yuans, accuse les années. Mais lui reste solide. Tous les jours, il parcourt près de 70 kilomètres, sillonnant la ville à la recherche d’objets usagés et abandonnés. Aujourd’hui, son butin est maigre : deux planches à roulettes, un parapluie crasseux et diverses babioles. « Les habitants me donnent les objets dont ils veulent se débarrasser. En échange, je leur rends des services. Par exemple, je leur donne un coup de main pour déménager leurs gros meubles. » Les meilleurs jours, il lui arrive de récupérer plus de 70 kg de marchandises. Le chargement peut alors atteindre des hauteurs vertigineuses. Il finit sa course dans un grand marché de récupération, situé au-delà du 5e périphérique de Beijing, pour y écouler sa marchandise. Le vente de ses produits peut lui rapporter jusqu’à une centaine de yuans par jour. « Ce qui se vend le mieux, c’est le métal. Mais en ce moment, le prix du métal baisse. Il faut vendre vite, avant que le prix ne continue de chuter. » L’homme est pressé. La concurrence est âpre avec les autres récupérateurs. Il doit repartir à la chasse. « Ce travail me fatigue beaucoup. Mais pour mes enfants, je peux tolérer la pénibilité du travail. » Pour sa famille, il a déjà mis 2 000 yuans de côté. Cette pensée lui donne des ailes. Le voilà déjà reparti en danseuse.

Ma Qianjin, 19 ans, livreur de boissons

livreurIl pourrait désaltérer un régiment entier. Tous les jours, Ma Qianjin transporte plus d’une centaine de caisses de bière Tsingtao. Le livreur de bouteilles fait la tournée des restaurants du quartier de Chegongzhuang à Beijing. Douze heures de travail non-stop, sept jours sur sept. Une vie à califourchon. Le jeune homme est robuste. Ses mollets tirent trois tonnes de cargaison par jour. « Je suis satisfait de mon travail », affirme-t-il, tout sourire. Il y a deux ans, fraîchement arrivé du Henan, sa province natale, il a été embauché par une société de distribution de boissons. Sur les 40 yuans que coûte la caisse de bière, il empoche 3 yuans. L’été est sa période de vaches grasses. La chaleur dope ses ventes, ses recettes mensuelles peuvent alors atteindre 4 000 yuans. « Plus je vends, plus je gagne de l’argent », conclut-il, avant de renfourcher sa selle. L’argent n’attend pas.

M. Lu, 51 ans, éboueur

_boueurM. Lu traque le moindre déchet sur son passage. Muni d’une pelle, d’un balai et d’un bâton à pinces articulées, il parcourt de long en large les abords du lac Houhai à Beijing. Son bleu de travail est de la même couleur que la petite benne embarquée sur son tricycle jaune. Pendant onze heures d’affilée, il guette les passants insouciants qui jettent leurs mégots ou leurs papiers sur la chaussée, et s’empresse de les ramasser. À la fin de la journée, il se rend au centre de collecte des déchets le plus proche pour y vider sa benne. Les journées sont monotones. Heureusement, son ami est là pour lui tenir compagnie. Il exerce le même métier, à quelques centaines de mètres de là. « C’est grâce à lui que j’ai eu cet emploi », reconnaît M. Lu, qui a été recruté par le comité de quartier, il y a un an. Avant, il s’était lancé dans différents petits commerces dans son village natal du Sichuan, mais sans succès. Venu à Beijing avec sa femme et sa fille de 6 ans, il a commencé à redresser la tête. Son emploi lui rapporte 1 400 yuans par mois. Même s’il doit travailler tous les jours de la semaine, il est satisfait de ses conditions. « En comptant avec le salaire de ma femme, employée dans une entreprise, je peux mettre tous les mois 1 000 yuans de côté. J’espère pouvoir faire assez d’économies pour retourner dans mon village l’année prochaine avec ma famille. » Mais pour l’instant, le Monsieur Propreté du quartier de Shichahai a un désir plus immédiat : prendre une bonne douche après son travail.

M. Jiao, 30 ans, réparateur de vélo

r_parateurLe vélo, c’est son rayon. M. Jiao bricole et répare les deux-roues ou trois-roues en un tournemain. Il a choisi un lieu idéal où poser son attirail : au pied de la tour du Tambour, au cœur de Beijing. Les clients sont nombreux et défilent toute la journée pour lui présenter leur vieux vélo en panne. Le plus souvent, la réparation n’exige que quelques minutes. Une rustine sur une chambre à air crevée et voilà l’engin remis sur pied. Le client débourse seulement 3 yuans. Il ne faut pas s’y fier. Réparer des vélos requiert un savoir-faire. « J’ai appris la technique auprès d’un vieil homme pendant deux ans. Je sais réparer tout, même les motocycles, à l’exception des voitures et des avions », plaisante le réparateur. Originaire de la province du Hebei, M. Jiao est venu à Beijing avec sa famille pour y gagner sa vie. Il est allé frapper à la porte du comité de quartier qui lui a proposé ce travail et fourni le matériel. En échange, il doit reverser à son employeur un pourcentage, de l’ordre de 30 yuans, sur ses revenus estimés à plus de 1 000 yuans par mois. Sa situation actuelle lui convient. Il offre même ses services gratuitement aux clients handicapés. « Lorsque mon salaire deviendra insuffisant, je changerai alors de métier », dit-il en souriant. Le soleil de l’après-midi le met de bonne humeur. C’est signe qu’il va avoir du pain sur la planche.

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